Vous connaissez certainement le proverbe qui parle des neufs vies du chat ?
En sortant de l’interview de Joël Castany, je me demande combien de vies il a dû en vivre, lui, et combien de personnes, haut placées ou plus modestes, il a pu y croiser. Au détour d’anecdotes, quelques noms sont égrenés, qui posent un homme : Chirac, Mitterrand, mais aussi d’éminents universitaires à travers la planète, des étudiants, des représentants politiques, des rois et princes, son oncle berger…
Faisant abstraction de son préalable d’humilité, j’oserais émettre l’idée qu’interviewer Joël Castany est un exercice de voltige. Il faut parvenir à retranscrire à la fois , le fonds et la forme : Le propos est dense, nourri de ses convictions et d’exemples concrets, souvent fleuris, mais toujours justes. Le schéma narratif suit des méandres, mais à la fin du paragraphe, ce conteur habile retombe toujours sur ses pattes ( une des fameuses vies du félin).
La forme, elle, est tout aussi évocatrice: accent rocailleux, bien sûr, mais pas que, et ce serait lui faire offense de la résumer à cela. Le regard, la gestuelle, et aussi un peu de pantomime pour illustrer des anecdotes et des situations – viticoles – ubuesques.
La prochaine fois, je viendrai avec un équipement vidéo !
J’ai sollicité Joël pour un portrait et il m’a accordé presque deux heures malgré un agenda chargé. Je tombe en pleine actualité chaude ( finalisation de la fusion entre Vinadeis et InVivo Wine*) mais l’homme n’est pas avare de son temps. Son engagement passe aussi par le fait, quoiqu’il en dise comme vous le découvrirez plus loin, de marteler son message, transmettre sa vision de la viticulture et les pistes de solutions qu’elle sous-tend.
Si vous évoluez dans le milieu viticole, est-il vraiment utile de dresser le portrait de Joël Castany, figure emblématique et charismatique du secteur ? De son village audois, Roquefort des Corbières, aux débats bruxellois, en passant par les sierras argentines, Joël marque son passage de ses engagements et ses convictions, clamés haut et fort.
Aujourd’hui, en retrait opérationnel de sa cave de cœur Cap Leucate, il siège au Conseil d’Administration de la coopérative Val d’Orbieu et préside le Conseil de Surveillance de Vinadeis. Administrateur du Groupe coopératif InVivo, il y est membre du bureau et responsable de la filière viticole. Autant dire qu’il garde un regard vif sur les sujets viticoles, environnementaux et plus largement économiques. Sans oublier, bien sûr, le sport : très engagé dans le rugby où il évolua au poste de demi d’ouverture, il est président du Sporting Club Leucate, club qu’il a lui-même créé.
« Au moment où je regarde en arrière, j’ai l’impression d’avoir fonctionné comme un appareil photo »
Avez-vous eu une figure inspirante ? Reçu des conseils particuliers ?
J’en ai eu plusieurs : j’ai eu l’honneur de succéder à Antoine Verdale, Président de la Confédération des caves coopératives, j’ai succédé à Jacques Luquet , président historique Val d’Orbieu, à Jean Baptiste Benet, Président du groupe vin du COPA COGECA à Bruxelles, à Yves Barsalou, président de la Languedocienne, ancêtre de Vinadeis, et à Leucate, un grand monsieur Pierre Gonzales, figure illustre de la résistance, un baroudeur extraordinaire.
De ces cinq grandes figures de la viticulture, j’ai pris de chacun ce qui me semblait le plus pertinent, et le plus approprié. A ces personnalités, marquantes, de ma vie publique, j’ajouterai mon grand-père et mon père, qui ont marqué mon enfance et mon adolescence bien sûr, et même encore aujourd’hui. Je discute encore énormément avec mon père. Je voudrais également rendre hommage à mon associé historique, qui est aussi mon cousin germain, Alain Castan et qui a su, de main de maître, « tenir la baraque » quand j’étais en vadrouille.
Pour finir, je voudrais citer une dame : Madame Jousseaume, avec qui j’ai eu l’honneur de partager la gestion de la cave de Leucate pendant 25 ans, une dame qui m’a profondément marqué par son humanisme, son don de soi, son sens politique, son habilité aussi, son franc parler et une vision du monde. Elle était très croyante, ce que je qualifierais de « démocratie chrétienne » dans tout ce qu’elle a de splendide.
On reste marqué par son éducation . Moi, je n’ai pas fait d’étude, j’ai eu le bac au 2ème coup, puis des études d’avantage « rugby » que sciences économiques. J’ai échoué aux deux mais mes quelques années au Crédit Agricole m’ont donné accès à des formations qui m’ont bien aidé par la suite.
Au moment où je regarde en arrière, j’ai 65 ans accomplis, j’ai l’impression d’avoir fonctionné comme un appareil photo, ou un enregistreur. Je n’ai pas la culture de l’écrit…ni la culture, ni les compétences, d’ailleurs j’ai un regret de ce manque de culture,…J’ai l’impression d’avoir pu capter par l’image et par le son ce qui pouvait guider mes réflexions, ma pensée et mon action . Y compris au rugby d’ailleurs.
« Je pense que je ne transmets rien : le monde a changé. La communication, l’éducation ont changé. »
Avez-vous vous-même un ou des conseils particuliers à transmettre ?
La transmission ? Quelle transmission ? J’ai plutôt un goût de cendre dans la bouche.
Ce serait vraiment immodeste de ma part de dire que je transmets. Je pense que je ne transmets rien : le monde a changé. La communication, l’éducation ont changé. Aujourd’hui, ça peut paraître prétentieux et je ne veux pas paraître prétentieux. Je le répète : un goût de cendres dans la bouche.
Quelle transmission pour la viticulture ? Alors qu’on a arraché. Le prix du Rivesaltes est le même aujourd’hui qu’en 1963. C’est un échec cuisant.
Alors comment pourrait-on dire…en particulier d’un homme… ? Bien sûr que localement, j’ai essayé de faire quelque chose. Mais transmettre….
Ma vision, oui, j’ai une vision, mais est ce que la bonne ?
« Vinadeis va disparaître. On va fusionner avec InVivo Wine »
J’ai assisté à une réunion en 1992 à Barcelone, où le Val d’Orbieu avait mis en exergue, cité comme le futur leader mondial, « un modèle exceptionnel » …. Regardez aujourd’hui, où on en est, on va fusionner avec InVivo Wine, Vinadeis va disparaître.
Un échec retentissant. Et celui de la filière….
J’ai un point de vue sur l’origine du mal. J’ai émis des points de vue mais malheureusement, je n’ai pas su le régler. Il y a plus de 25 ans, je faisais déjà le même constat. Quelles sont les clés pour un modèle de développement ?
Je suis retombé par hasard sur une interview donnée en 1994 . J’y racontais ceci :
« En 1976, on a eu l’obtention de l’Appellation Corbières, …mon père pensait avoir gagné au loto ! » Les difficultés ont commencé à ce moment-là. On a voulu faire d’un modèle d’exception le modèle du développement. On a tué l’exception et on n’a pas réalisé le développement.
Ça ne veut pas dire qu’il ne faut pas reconnaître les signes de qualité mais est-ce pour autant un modèle de développement que de développer des privilèges ?
Petite anecdote … l’autre jour, j’étais à table avec des présidents de grands groupe et on a bu une bouteille d’Armagnac. Sur la bouteille, il est écrit VSOP .
Vous savez ce que cela veut dire ? Et bien non, et pourtant vous connaissez le métier …
La démonstration de notre échec ! Very Spécial Old Product ….un mot anglais. La démonstration de notre incurie : écrire des choses inexplicables…
On a banni de notre vocabulaire l’expression « consommation courante » . On a voulu faire du vin une exception, proposé et consommé selon un modèle d’exception. Mais un tel modèle, ça s’apparente à de la protection de privilège. Et ça entrave le développement .
« Connaissez-vous les 7 usages du raisin ? »
J’ai eu l’occasion d’écrire, mais j’ai surtout beaucoup parlé à propos des 7 usages du raisin :
1 : Le raisin qui peut être consommé frais, c’est le raisin de table.
2 : Le raisin peut aussi être consommé en raisin sec ; la France importe 100% de ses besoins. Alors que par exemple, j’ai en tête une exploitation en Argentine : 40 ha au sol …on en trouve beaucoup en Argentine
3 : Le raisin peut être consommé en jus de raisin . Au brésil, ça fait fureur .
4 : Le raisin peut donner lieu à l’élaboration de moûts concentrés ou rectifiés , qui donnent le sucre de raisin. On est quand même assez fort pour distiller avec des subventions des excédents de vins qui ont été enrichis avec du saccharose. On se suicide ! Toutes les bases de jus de fruits aux Etats Unis sont des mouts de raisin concentrés ..
5 : On peut bien sûr, faire du vin
6 : Ainsi que du vinaigre. La France ne produit plus 1 litre de vinaigre sauf quelques litres artisanaux. C’est un marché en forte croissance et on ne produit pas de vinaigre. Alors que pourtant 5% de notre production ne valait rien.Ça ne vaut rien…. Un péché mais le vinaigre ce n’est pas assez chic !
7 : L‘alcool . On avait l’eau de vie du Languedoc, on a tout laissé tomber
On a perdu le contact avec les principes de base : la production, son usage et son utilité. Je donnais récemment une visio conférence pour une université d’Argentine et je me suis pris une question comme un uppercut : « Vous , en France , vous distillez, mais savez -vous que le sucre de raisin est un aliment exceptionnel pour les populations qui ont faim ?» C’est terrible…de recevoir ça ! En Argentine, au Brésil, ils ont faim . Ça fait réfléchir, encore et toujours. Où est-ce qu’on a perdu le fil ?
Quand vous êtes nés dans un village comme moi, à Roquefort, où il y a avait 800ha de vignes. Vous vous retournez : la coop a fusionné (avec Leucate). Il y avait 18 vignerons indépendants, il n’en reste que 2. La vigne périclite et ne vaut pas 10000 €/ha. La vigne la moins chère du monde et je pèse mes mots…
Une catastrophe ! D’autant que personne ne veut l’envisager sous cet angle.
Je suis très acteur au niveau environnemental pour les parcs naturels de la région. Et sur le sujet aussi je pense que pour régler le mal, il faut accepter de dire qu’on est malade.
L’exemple de la route entre Narbonne et Perpignan. Ah oui, c’est vrai il y a un cadre magnifique mais au lieu de prendre en photo les flamants, on ferait mieux de prendre en photo la pourriture : les décharges sauvages, les zones d’activité à moitié vides et sales, les bouteilles jetées par les camionneurs, les carcasses de voiture et autres misères de bord de route.
On a une capacité à se bander les yeux et se gargariser sur les pseudo succès, à se cacher derrière son petit doigt.
En Languedoc, on pense que parce que Gérard Bertrand a réussi (et c’est tant mieux), on a réussi… !
« Le défi de la planète aujourd’hui, c’est savoir comment on va boire et manger »
Je suis profondément Occitan, profondément, je parle occitan couramment, je ressens une appartenance historique. Le bassin méditerranéen était la base de la vie, de la viticulture, de la culture avec les troubadours, on était la base de la modernité. On finit par être une région sous développée qui attend pour vivre la manne d’un tourisme plus ou moins bien organisé…
La viticulture du Languedoc est née en 1850, pas avant. Elle est née avec le chemin de fer.
Le livre « Les guerriers du vin » retrace ça : la viticulture a été produite par l’état . Puis il y a eu le grand mensonge…A l’époque, on était sur la consommation alimentaire.
Un petit verre , chaque jour, ça n’a jamais tué personne. C’est l’excès qui tue.
Dans ma jeunesse, la production d’Algérie arrivait à Sète. Elle partait ensuite chez les Vignerons de la Méditerranée ou la Coopérative de Bretagne. On avait des vins, de Castel par exemple, à 6 °, pas plus…. Mais à ce moment-là, on a voulu un équilibre malthusien dans un marché qui allait s’ouvrir.
Quand j’entends, et je l’ai entendu, au parlement européen, des députés sérieux dire « On va faire du carburant avec les excédents de l’agriculture »…mais on crève de faim sur la planète !
Le défi de la planète aujourd’hui, c’est savoir comment on va boire et manger…donc, à la question, vous allez transmettre ? Transmettre quoi ? Moi je voudrais, si je pouvais écrire, transmettre qu’on s’est trompé.
Mais, peut -on rectifier le tir ? Je pense qu’à un moment, le pragmatisme peut reprendre le dessus qu’enfin on aura une vision économique du sujet.
Quelle est votre vision sur la crise et ses conséquences sur l’économie, le secteur viticole… et d’un point de vue sociétal, envisagez-vous un changement des modes de consommation ? Un élan des circuits courts ?
« La vision sympathique et utilitaire du modèle « circuit court » ne suffit pas »
Je pense qu’il y a des chances que cette crise fasse ressurgir une part de pragmatisme .
Mais de là à dire que, pour l’agriculture, les circuits courts sont la solution, je n’irais pas jusque-là. Ça peut être une partie de la solution. Je ne suis pas un grand fan du « Small is beautiful ».
Cette situation terrible que l’on vit en ce moment, la crise sanitaire et la pénurie…pénurie de vaccins, de masques fait réfléchir, forcément.
La France, plus globalement, l’Europe a laissé filer son industrie, ses outils de production. Ce qui se passe aujourd’hui : la pandémie, le passage de Trump, la situation en Chine qui achète la moitié de l’Afrique, les protestations en Russie, on voit bien que le monde bouge : C’est la démonstration flagrante des perturbations sanitaires et des dérèglements géopolitiques. Alors oui, il y a les circuits courts, cette vision « sympathique » et en même temps « bonne conscience », mais il faut envisager un autre « étage » à la solution : Il y a une notion de volume, de possibilité d’indépendance alimentaire.
Cette notion de proximité, de nouvelle donne, si je la ramène au cas des peuples d’Argentine ou du Brésil qui ont faim, ça ne suffit pas. Peut-être avons-nous, comme pour les environnementalistes, avec qui je partage un certain nombre de thèses, une capacité d’alerte. Cette crise nous donne une alerte. Inspirons-nous de l’échec !
« Territoire et microéconomie en puzzle »
Alors là, oui, dans ce cas précis, je pourrais transmettre quelque chose : ma conception de la microéconomie en puzzle.
Je suis un adepte de la microéconomie en puzzle. Petite métaphore inspirée de ma petite période en pastoralisme :
Dans ma jeunesse, avec mon oncle, on a mené un troupeau de 300 brebis. On avait 3 chiens. La portée de notre voix suffisait à contrôler le troupeau. Mais si vous mettiez 50 mètres de plus, un chien de plus, vous en perdiez 10 par jour.
L’homme a la capacité à se développer autour de lui, dans un périmètre limité. Au-delà, il est inaudible. Nos pensées et nos actions s’emboitent dans d’autres territoires, pour une économie solidaire.
L’alliance plus que la centralisation. Les territoires. Les projets dépassent la limite des départements. Les hommes et les femmes sont investis sur leur territoire dans des actions efficaces. Donnez-leur le vaccin et vous verrez en combien de temps tout le monde va être vacciné…
Ça me rappelle, en 92, j’avais parlé à l’époque de « l’incompatibilité jacobine avec la construction européenne ». Vous avez l’état fabriqué par Napoléon, centralisateur, autocrate, parfois fermé, qui décide…Prenons l’exemple de l’attestation, la même à Aubervilliers que dans mon village où on ne croise jamais un chat !
Revenons aux territoires et bâtissons des projets de développement qui dépassent les départements : les hommes dedans et des développements adaptés.
Il y a longtemps, je me souviens, à un monsieur du front national qui m’attaquait sur ma vision . Je me suis levé et je lui ai dit : « Au tout début, dans ma tribu, on produisait déjà des olives, du vin et des amandes, et un peu de poisson. Et on aspirait à manger des oranges et de la viande de bœuf. Alors ma tribu est allée voir d’autres tribus plus loin et elle a fait du troc avec les producteurs d’orange et les producteurs de viande de bœuf. Troc, et progressivement, le marché, puis économie de marché : alliances des territoires. » et j’ai regardé ses pieds « Monsieur, vous portez des chaussures fabriqués par des enfants philippins, vendus à grand prix par la marque …, vous en êtes content ? »
Avec les circuits courts, on en revient à cette idée de marché mais elle est très limitée. Elle a des limites.
« Organisation du Télétravail : le signal d’un nouveau départ ? »
Vous me parliez d’influence. Je vais vous citer quelqu’un que j’ai découvert depuis quatre ans, grâce à InVivo, l’économiste et conférencier Philippe Dessertine. Il parle de la défragmentation fédérée. 90% de la population de la planète vit sur 2 % du territoire. On a rassemblé les populations et on les a stockées dans des tubes.
Les lieux d’habitation sont concentrés, la population ne peut plus circuler, les espaces naturels désertés. Les risques d’inondations sont accrus. L’exemple le plus parlant, proche d’ici est celui des Pyrénées Orientales : une vraie désertification, plus aucun maraîchage.
Le moment est venu de repartir. Le signal, c’est peut-être le travail à distance. Les 1000 salariés d’InVivo ont été mis en télétravail , répartis chez eux, à 300/400 km du siège (parisien). Dessertine avait anticipé cela. La crise que l’on traverse, la fin de la grande distribution massive, …Il dit « on repartira ». et tout le monde aspire à cela.
Les crises ont un rôle d’accélérateur. La crise viticole était latente. Le Covid l’a précipitée.
Laisser une trace au travers d’une agriculture environnementale
L’an dernier, quand on a fêté le centenaire de la cave de Leucate, j’ai été très touché, car les témoignages reçus m’ont donné l’impression d’avoir laissé une trace dans cet outil séculaire. Ça m’a touché . Pas de fausse modestie. J’y ai passé 35 ans et un homme est touché par certaines formes de reconnaissance. Donc, une trace oui, mais quelle transmission ? On en revient à la question précédente….
Qui aurait imaginé au XVIème siècle, dans une famille agricole que tous ses successeurs auraient décidé de tout détruire ? L’agriculture, qui aujourd’hui est accusée de tous les maux, ne peut pas avoir fondamentalement décidé le mal des autres .
Elle a été victime de ce que l’on vient d’évoquer juste avant et du comportement de l’industrie chimique, complètement pervers, au travers aussi du langage ésotérique de l’étiquetage : le médecin l’a dit, le technicien agricole l’a dit, le pharmacien l’a dit, donc c’est bien . Mais est-ce vraiment ce qu’a dit la nature ?
J’y suis venu sur le tard mais je crois aujourd’hui fortement aux thèses environnementalistes. Elles sont fondamentales.
Sujet numéro 1 de l’environnement : l’eau . L’eau et les voies de communication. D’ailleurs, vous voyez, on a envoyé une sonde sur mars : et on se réjouit car elle a trouvé de l’eau !
Ensuite, deuxième point : Se nourrir, mais se nourrir sans détruire la santé bien sûr, et avec un minimum de protéines .
Les Espagnols ont un mot pour ça : le medio ambiente, le milieu ambiant .
Et puis, quand on parle de l’environnement, il faut arrêter de responsabiliser le commun des mortels parce qu’il fait mal son tri sélectif.
Il y a deux grandes notions, un double concept, à mon sens : la lutte en amont et l’alternative .
Je reviens sur l’exemple du tri sélectif. Les bouteilles en plastique, on vous dit « Vous allez payer un droit à polluer » mais qu’est-ce que ça veut dire ? Qu’on va continuer à produire des bouteilles en plastique, on va aller les trier, on ne saura pas les recycler, on va les envoyer au fin fond de l’Afrique …alors qu’il suffit de ne plus les produire .
Je répète : double concept lutte en amont et alternative . Ça passe par l’éclairage, au sens éducation, vulgarisation et ensuite l’exemplarité . Exemplarité des grandes entreprises, industrie chimique …Et pourquoi n’a ton pas compris qu’à l’école, il fallait un cours environnemental ?
Je reviens aux théories de Dessertine : on a cultivé la planète au faux PIB . Le faux PIB, vous voyez ce que c’est ? C’est quand on prend sa voiture pour aller au travail. On consomme de l’essence, on fume des cigarettes, on écoute la radio, on pollue, on émet des gaz à effet de serre, on fait marcher les assurances.. On ne fait rien . Ça, c’est du faux PIB. Il y a forcément une alternative.
Prenons des cas concrets. Sur mon territoire, par exemple, il n’y a pas d’eau, il y a trop de soleil. Trop de vent. Qu’est-ce qu’on fait ? Pour l’eau, on a installé un système de recyclage de l’eau de la station d’épuration et ça marche très bien.
Il y a trop de soleil : on va mettre des panneaux photovoltaïques dans les vignes.
Les pesticides ? Éradiqués dans ma cave. J’ai fait mettre en place un système naturel d’alternative aux pesticides (Ndr « confusion sexuelle », technique de lutte, utilisée en viticulture et agriculture , contre les parasites notamment les insectes en perturbant leur système hormonal de reproduction) à l’annonce du cancer du sang de l’épouse de mon associé. A cette terrible annonce, j’ai organisé un voyage d’études avec les adhérents et au retour, tout était décidé et mis en place dans la foulée.
L’alternative. Bien sûr il faut arrêter le chimique, le glyphosate, mais qui a prévu l’alternative ?
Le bio ? un outil marketing plutôt qu’une garantie.
Le citoyen a besoin d’éducation. On y arrive : il y a de plus en plus de sens de la responsabilité locale.
« Le Slow ? Quelle est la bonne mesure pour la qualité de vie ? » Invivo
Alors oui bien sûr, on peut parler de « Slow » mais le Slow c’est un art de vivre, c’est une qualité de vie, mais tout le monde ne vit pas à ce rythme-là. Mon meilleur ami me dit tout le temps que je suis fêlé, que je saute partout. C’est vrai. C’est ainsi que je fonctionne !
Mais quel est le bon degré de mesure de la qualité de vie ?
Tolérance ! On a bien besoin de tolérance, évitons de donner des leçons… non à la pensée unique. Un peu de tolérance et de responsabilité, et comme fil rouge : l’éducation .
Comme souvent avec Joël, on a fait des détours, des emphases et des digressions. Difficile de prendre des notes car le verbe est captivant. Mais il est adepte de l’exercice et à la fin de son exposé, la boucle est bouclée, questions d’actualité, la viticulture, le slow.
Tout est dans tout. Le message est énoncé, la réponse aux questions, dans le désordre, est donnée. L’attention est portée à son interlocuteur. Il profite de l’entrevue pour revenir sur l’actualité vive du moment : Le devenir du groupe Vinadeis. *Un accord de fusion est en cours qui devrait être finalisé sous peu. Il me propose d’évoquer le sujet encore off, mais prochainement sur le devant de l’actualité.
« La fusion entre Vinadeis et InVivo Wine se fait entre deux acteurs référents du secteur. On a trouvé un accord qui permet d’entrevoir l’avenir avec plus de sérénité »
Il faut des moyens pour accéder au marché. Vinadeis a la possibilité de se les donner et de le faire avec un cousin germain : on a la force du conseil d’administration et une vraie volonté de structure.
Val d’Orbieu, Vinadeis arrivent au bout de leur organisation et de leur stratégie. Le groupe a eu une belle vie. Il lui faut un nouvel élan.
Actuellement, la rentabilité est faible. On a trouvé un accord qui permet d’entrevoir l’avenir avec plus de sérénité qu’au moment de la fermeture de l’usine de Narbonne (Ndr Fermeture VIM Février 2020). Il en va de la responsabilité sociétale.
La fusion entre Vinadeis et InVivo Wine se fait pour donner un acteur référent du secteur. Cela préserve les intérêts des deux parties avec une continuité dans le lien avec les coopératives actionnaires Val d’Orbieu et Vendéole .
On sait bien qu’on a besoin d’appuis économiques et de débouchés. La fusion tient compte d’une vraie problématique de distribution, de communication, de RSE et de démarche normative.
Je vous l’ai dit plus tôt, je n’aime pas l’expression et je ne peux pas accepter « Small is beautiful ». En France, on dit le petit Jésus, mais dans les pays anglosaxons, on dit « Great Jesus ». En France, on dit « boire un petit vin du coin », Il faut dire un GRAND vin…Small n’est pas toujours beautiful . En fait, Small is Small ! Point.
Et cette notion de grand, méchant, loin, opaque, Non ! Ce n’est pas réel, ni réaliste. Elle est le fruit de la peur du vide. Fruit de la méconnaissance et des fantasmes et aussi des incapacités à y accéder. Ce qu’on pourrait qualifier de jalousies. Voilà, c’est terrible…
Il ne faut pas céder à la peur.
Songeur, Joel ajoute :
Je suis curieux , sûrement un peu opportuniste. Mais je n’ai pas eu peur. Il faut avancer. Arrêter de dire non. Souvent on dit non par peur. Moi qui suis peureux, je pense avoir su éviter, la peur du vide.
Et des personnalités, j’en ai rencontrées : Chirac, Mitterrand, le prince de Monaco, le Roi d’Espagne, jamais je n’ai été impressionné. J’ai su m’adapter.
En temps de crise, on est tous dans le même bateau. Pas de place pour les tergiversations. Qui on jette par-dessus bord en cas d’avarie? Les petits, les gros, …. ? Qu’est-ce qu’on fait : On écoute le chef.
Difficile, après ce scoop et ces envolées sur la marche du monde, de terminer sur une touche plus intimiste. Un portrait déjà très clair se dégage des propos livrés. Mais Joël n’est pas avare de son temps. Il m’avait accordé une heure ; la deuxième est largement entamée. Pourtant, l’exercice du portrait chinois semble plus délicat. L’homme n’est pas du genre à se pencher sur son propre cas, à l’image de son mot préféré :
Votre mot préféré ?
Plutôt une phrase : le groupe est plus fort que le plus fort du groupe.
Votre dicton ou mantra préféré ? Je garde cette phrase ?
Non, notez « Il n’y a pas de problème, il n’y a que des solutions »
Votre vin ou votre cépage préféré ?
Un vins issu de grenache noir traditionnel, carignan, syrah, mourvèdre
Un Châteauneuf du pape, ou un Fitou
Vous savez ce qu’est un bon vin ? Un bon vin bon c’est celui qu’on vide ….
Le son, le bruit que vous aimez ?
Les voix hautes des cantatrices et celles de Nana Mouskouri, Barbara Streisand
Votre juron, gros mot ou blasphème favori ?
« Putain de diou », en Occitan
Un homme ou une femme pour illustrer l’étiquette d’un de vos meilleurs millésimes ?
Carole Bouquet, élégance, intelligence, douceur, visage clair…
Elle produit d’ailleurs un joli muscat…Ou un navigateur du Vendée globe. Une trogne…
Le métier que vous auriez aimé exercer si vous n’aviez pas occupé vos fonctions ?
Journaliste sportif, j’ai fait un stage au « midi olympique » dans ma jeunesse.
La plante, l’arbre ou l’animal dans lequel vous aimeriez être réincarné ?
Un chien
Quel est votre film, votre chanson, votre livre, votre morceau de musique préféré ? ou celui qui vous détend ?
Un film avec Bébel, dans ses classiques : action et bagarre !
Votre destination de voyage en général ?
La Patagonie, sans aucune hésitation
Enfin, si vous deviez dresser votre portrait en 3 mots :
Engagé, engagé, engagé !